Biographie de Xanana Gusmão

(Version provisoire)

Kay Rala Xanana Gusmão, de son nom chrétien José Alexandre Gusmão, est né le 20 juin 1948 à Laleia, près de Manatuto. Il étudie au séminaire jésuite de Dare, puis au lycée de Dili. Il devient fonctionnaire et étudie en soirée.

Peu avant le 25 avril 1974 [date de la révolution des oeillets au Portugal], il décide d'émigrer en Australie avec sa femme Emilia et son fils Eugenio, et se rend à Darwin. Les événements politiques le font toutefois changer d'avis et il retourne à Timor. Ceux qui le connaissaient alors le décrivent comme un homme réservé, absorbé par la poésie et montrant une capacité certaine à l'observation et l'analyse politique. Après quelque hésitation, il adhère au Fretilin après avoir gagné le prix de poésie timoraise pour son poème "Mauberiadas", inspiré d'un poème épique de Luis de Camões.

En septembre 1975, après le "coup d'État" raté de l'UDT et le retrait de l'administration portugaise, alors que le Fretilin est de facto en charge de l'administration du territoire, il travaille comme photographe au département de l'information, et se retrouve sur la frontière indonésienne à l'époque des incursions militaires qui commencent à la mi-octobre. Il est ensuite élu au Comité central du Fretilin.

Après l'invasion du 7 décembre 1975, il reste en arrière pour rendre compte de la situation à Dili; il est le dernier membre du Comité central à quitter la capitale. Une fois dans le maquis, il devient commandant de bataillon, puis secrétaire de la base de la guérilla, Haksolok. Au moment de l'opération indonésienne d'encerlement et d'annihilation (1977-1979), il est en charge du secteur militaire de Ponte Leste, la partie la plus orientale de l'île.

En 1979, l'opération encerclement et annihilation parvient à briser l'épine dorsale de la résistance à coups de bombardements quotidiens et massifs, de destructions de terres et de bétail. Sur sa demande, la population, réfugiée dans les montagnes depuis l'invasion, se rend aux Indonésiens. Le Fretilin est décimé et la quasi-totalité de son comité central est capturé et assassiné. C'est notamment le cas de son leader, Nicolau Lobato, tué le 31 décembre 1978. Xanana Gusmão est l'un des rares survivants.

Avec deux autres survivants, Serakey et Mau Huno, Xanana entame le difficile processus de regroupement. Serakey est tué en 1979 en essayant d'établir des liens avec le Fretilin dans le secteur central. Ces tentatives sont finalement couronnées de succès en 1980.

À sa première conférence nationale, tenue dans la zone centrale en mars 1981, le Fretilin, jusqu'alors un front, est transformé en parti marxiste-léniniste et le Conseil révolutionnaire de résistance nationale (CRRN) est créé: il comprend le Comité central et le commandement général des Falintil. Xanana devient son dirigeant et le commissaire politique national du Fretilin.

La résistance survit à la campagne de "barrières de jambes" indonésienne de 1981 (impliquant la totalité de la population masculine de 15 à 50 ans), et continue à se reconstruire et à se consolider. Elle crée un gigantesque réseau de contacts clandestins à travers les camps de concentration où l'immense majorité de la population a été regroupée à partir de 1978. Ces réseaux clandestins, pendants civils de la guérilla, sont un élément clé de la résistance à l'occupation. En 1982, la guérilla est redevenue une menace significative à la mainmise de l'Indonésie sur le pays.

En 1983, les forces indonésiennes subissant de nombreuses pertes sous la pression intense de la guérilla, le colonel Purwanto, commandant en chef indonésien de Dili, ouvre des pourparlers de paix. Xanana conduit les négociations les 21 et 23 mars à Lari Gutu. Il en résulte une rupture avec l'aile la plus radicale du commandement de la guérilla, qui s'oppose à l'initiative. Les pourparlers conduisent à un cessez-le-feu de mars à juin 1983. Ce cessez-le-feu est rompu par le général Murdani, commandant-en-chef des forces armées, lorsque la nouvelle en parvient à l'extérieur. La guerre reprend.

En 1984, lors de la seconde conférence nationale du Fretilin, Xanana plaide pour l'ouverture de sa base politique, seul moyen selon lui d'atteindre l'indépendance. La structure de parti marxiste-léniniste est supprimée: le Fretilin redevient un front, au même sens qu'en 1974-75.

Les années qui suivent donnent raison à Xanana: la base de soutien de la résistance s'élargit. Elle obtient la solidarité de l'église locale ainsi que de larges secteurs de la population, en particulier des jeunes, sans compter celle des leaders de partis qui avaient combattu le Fretilin.

Xanana s'emploie à convaincre la communauté timoraise en exil de s'unir également, ce qui donne naissance en 1986 à la Convergence nationaliste, regroupant Fretilin, UDT et (informellement) église timoraise.

En 1988, dans le cadre d'un réajustement structurel de la résistance, le CRRN est dissous et transformé en CNRM (Conseil national de la résistance maubere), coalition non partisane regroupant le Fretilin, l'UDT et le Renetil (organisation clandestine de la jeunesse timoraise).

En 1989, les Falintil, jusqu'alors bras armé du Fretilin, sont transformées en armée non partisane, Xanana restant leur commandant.

L'ouverture du territoire au monde extérieur en 1989 permet aux réseaux clandestins d'organiser des manifestations lors de la visite du Pape (octobre 1989) et de l'ambassadeur des États-Unis (janvier 1990), donnant à la lutte une dimension internationale.

Le 27 septembre 1990, Robert Domm parvient à contacter Xanana dans le maquis et à l'interviewer pour le compte de l'Australian Broadcasting Corporation. C'est la première rencontre avec un journaliste étranger. L'interview, publiée dans le bulletin no 102 de TAPOL (décembre 1990), fournit le premier portrait détaillé de Gusmão, ainsi que son évaluation de la stratégie de l'ABRI (forces armées indonésiennes) et des difficultés auxquels les Falintil sont confrontées. L'expression la plus marquante de l'interview est "Résister, c'est vaincre!", appel repris par toutes les communautés timoraises depuis lors.

Le 20 novembre 1992, un peu plus d'un an après le massacre de Dili et après la capture du numéro 3, Mau Hodu, en février, Xanana Gusmão est capturé à Dili par l'armée indonésienne. Il est pratiquement gardé au secret jusqu'à son procès en février 1993, qui le verra condamné en mai à la réclusion criminelle à perpétuité. Sa défense, document majeur, se révèle tellement embarrassante pour Jakarta qu'elle est censurée, fait sans précédent dans les annales des procès politiques indonésiens. La peine de Xanana est réduite à 20 ans par Suharto, suite à une prétendue requête de sa part (faite en réalité sans sa connaissance par son avocat imposé par les militaires).

En 1994, Xanana reçoit le prix des droits de l'homme de l'Association australienne pour les Nations Unies.

Le 15 juillet 1997, le président sud-africain Nelson Mandela, en visite officielle à Jakarta, obtient une entrevue avec Xanana, sorti exceptionnellement de sa prison pour l'occasion. Suite à cette rencontre, il s'engage dans la recherche d'une solution négociée au conflit de Timor-Est. Mandela demande à Suharto la libération de Xanana Gusmão; cette requête obtient une fin de non-recevoir. Sous Habibie, Xanana est placé en résidence surveillée en février 1999.

Xanana Gusmão est marié et a un enfant. Sa femme et sont fils sont tous deux exilés en Australie.


Retour à la page précédente
Retour à la page principale