Mission de Jacques Reveillard et Michel Waldschmidt au Mali en octobre 2008

Comité de jumelage Limours - Les Molières - Nioro - Fégui

Un bref compte-rendu

Après la visite qu'ils avaient effectuée au Mali du 8 au 23 Mai 2007, Jacques Reveillard et Michel Waldschmidt y ont fait un nouveau séjour du 24 au 31 octobre 2008. Ils se sont rendus à Heremakono le 25 octobre, sont allés à Fégui le 26, sont revenus de Fégui à Bamako via Kayes le 29, sont allés à Dialakorodji le 30 et sont retournés à Heremakono le 31. Voici un bref compte-rendu de ce voyage.

       Nous sommes arrivés à Bamako le 24 octobre. Nous avons passé les deux premières nuits à Badalabougou dans la Maison d'Hôte de Fatime et Marietou, gérée par Youssouf Sy, là où Hélène avait logé lors de son stage à l'Hôpital Gabriel Touré l'été 2003.

       Le samedi 25 octobre nous sommes allés à Heremakono pour y rencontrer Baba Dramé. Il nous a remis un Rapport d'activité et bilan financier du centre de santé communautaire de Heremakono (premier, deuxième et troisième trimestre 2008). L'introduction annonce que l'inauguration officielle du CSCOM a été célébrée en septembre 2005. Il apparaît en fait que notre dispensaire n'est pas encore reconnu comme un CSCOM, il est seulement un centre de santé annexe du CSCOM de Dialakoroba (les conditions de création d'un Centre de Santé Communautaire CSCOM font l'objet d'un décret 05-299 du Ministère de la Santé le 28 juin 2005).
       La fréquentation n'a pas progressé: en octobre 2008, il y a eu en tout 112 consultations, à savoir 64 consultations médicales, 5 consultations CPN (Consultations Pré-Natales), 3 accouchements et 40 soins. Il y a eu aussi 5 vaccinations. La baisse de la fréquentation coïncide avec le départ du Dr Diarra. Il a été remplacé par un major qui n'a pas le même niveau de qualification. Cette déficience dans le fonctionnement du dispensaire est la raison initiale de notre voyage - pour le préparer une lettre avait été adressée à Baba Dramé fin septembre 2008. Un point positif cependant est le fait que deux médecins font de temps en temps des consultations au dispensaire, surtout le dimanche.
       La dernière page du Rapport d'activité comporte le passage suivant: "Un grand hommage à Hélène WALDSCHMIDT, notre ambition est de vous faire vivre pour continuer à remplir la noble tâche qu'est la médecine au service des patients, à travers le centre de santé communautaire d'Heremakono".
       Nous avons demandé à Baba Dramé de prendre pour nous rendez-vous pour le vendredi suivant avec le médecin chef du centre de santé de référence à Ouelessebougou, le Dr Mahamadou Traoré, pour voir avec lui quelles mesures devraient être prises permettant d'améliorer la fréquentation du dispensaire.
       Nous avons été voir le dispensaire, avec notamment le frigidaire qui a mis tant de temps à être livré (acheté en décembre 2007, il n'a été fourni qu'en septembre 2008). Les vaccinations ont à peine débuté: il ne suffit pas de disposer de vaccins pour que les patients viennent, il faut aussi pouvoir leur donner une moustiquaire imprégnée pour chaque vaccination (ces moustiquaires sont aussi fournies au moment des consultations prénatales: les femmes enceintes d'Heremakono vont pour cela à Dialakoroba).
       L'éclairage est déficient, à cause du vol des panneaux solaires. Le seul panneau solaire qui reste, servant à alimenter notamment le réfrigérateur et la pompe du puits, est rentré chez lui chaque soir par le major qui loge sur place. Les salles sont très bien entretenues, l'hygiène est bonne - les profils de postes sont affichés et les directives élaborées par Hélène Seuxet semblent bien suivies.
       Nous avons vu près du dispensaire un nouveau forage destiné aux villageois, ainsi que des préparatifs pour creuser un nouveau puits.

       Le dimanche 26 octobre nous sommes allés de Bamako à Fégui où nous avons passé deux jours.

       Fégui est, avec Nioro du Sahel que nous avions visité l'an dernier, une des deux villes jumelées avec Limours et Les Molières. Cette commune est située à 90 km de Kayes, à la frontière avec le Sénégal, la rivière Falémé (affluent du fleuve Sénégal) séparant les deux pays. Les deux communes au Sénégal juste de l'autre côté de la Falémé sont peuplées majoritairement de maliens qui entretiennent de bonnes relations avec leurs voisins - en saison sèche on peut franchir la frontière sans se mouiller les pieds. La route depuis Bamako via Kayes en direction du Sénégal est un goudron récent en excellent état jusqu'à Kouloumbo, 70 km après Kayes. Il reste alors à parcourir un peu plus de 20 km sur une piste relativement récente qui est convenable pour un 4x4 hors saison des pluies. Au dernier recensement de 2002 il y avait 3500 habitants, il doit y en avoir près de 5000 maintenant, répartis en 92 familles. L'ethnie majoritaire est le Soninké, il y a aussi des Peuls, des Bambara et des Maures. Dans la plupart des familles certains membres sont émigrés, ce sont eux qui payent la presque totalité des impôts - c'est une source de revenus importante pour la commune, d'autant plus que les associations de féculions émigrés contribuent au développement des infrastructures. L'agriculture est une des principales activités. En 2005 le cheptel comprenait 669 bovins, 849 ovins/caprins, 273 asins et 12 équins. Le nombre d'ânes est étonnant - nous avons constaté qu'ils étaient spécialement bruyants la nuit - ils envahissent la cour de l'école où nous passions la nuit; il est important de terminer la clôture qui est prévue.

       Nous avons été reçus par le Maire Samba Camara et ses adjoints, Yaya Soumaré premier adjoint en charge de la santé et de l'éducation qui nous a fourni beaucoup d'information, Cheikna Soumaré deuxième adjoint et Mariène Traoré troisième adjointe, le secrétaire général Salif Traoré, le médecin du CSCOM le Dr Absolutie Arama, l'Imam Ibrahima Soumare qui a créé un périmètre irrigué pour le maraîchage, le directeur d'école et son adjoint, le chef du village, le père de Daouda Touré, ancien député, et Daouda Siby qui a aussi créé un périmètre irrigué. Fégui n'est pas électrifié, et c'est un handicap sérieux pour son développement. Nous avons longuement discuté avec nos hôtes des perspectives de développement de Fégui - nos interlocuteurs nous ont remis le Plan de Développement Social, Économique et Culturel PDSEC 2006-2010. Il est déjà réalisé à 80 %. Parmi les réalisations prévues et non encore réalisées, mentionnons la création d'un marché avec autogare, un parc de vaccination pour les animaux, la création d'un réseau téléphonique (les communications pour les téléphones portables passent actuellement par le Sénégal), l'extension du CSCOM sur laquelle nous allons revenir. Le secrétaire général de la Commune Urbaine de Fégui, Salif Traoré, est dynamique; il nous a exposé lui-même toutes les réalisations que Fégui lui doit et qui montrent sa compétence - il a passé beaucoup de temps avec nous et a organisé notre séjour avec beaucoup d'attention.

       Le lundi 27 octobre nous avons d'abord visité longuement le CSCOM où nous nous sommes entretenus avec le médecin qui dirige le centre, le Dr Abdoulaye Arama. Un des projets présentés par la municipalité dans le PDSEC est une extension de ce centre qui permettrait de disposer de deux salles, une pour la maternité et une pour l'hospitalisation; actuellement il n'y en a qu'une où les femmes sur le point d'accoucher ou venant d'accoucher côtoient les autres patients alités qui peuvent recevoir leur famille. Le Dr Arama nous a présenté ses principaux besoins (dont la liste est sur le site) en tant que technicien de la santé. Le petit matériel devrait pouvoir être obtenu pour eux. Son premier souhait est d'obtenir une électrification du centre de santé qui permettrait
- d'utiliser le stérilisateur qui a été remis au dispensaire par les autorités sanitaires, mais qui ne fonctionne pas avec les panneaux solaires
- d'envisager l'achat d'un appareil pour échographie (le Dr Amara suivrait alors une formation de 3 mois lui permettant de l'utiliser) - cela permettrait de faire des diagnostics précoces pour les femmes enceintes qui devraient être dirigées sur Kayes pour l'accouchement
- de remplacer le réfrigérateur actuel qui fonctionne avec du pétrole par un réfrigérateur électrique revenant beaucoup moins cher.
       Après le CSCOM nous avons visité l'école. Le second cycle vient d'ouvrir au niveau équivalent à la 6ème, il n'y a actuellement qu'un enseignant pour 18 élèves, il est professeur de mathématiques et de physique. Il donne donc des cours dans sa spécialité en attendant la venue de collègues qui pourront compléter le programme. Il est prévu d'ouvrir chaque année le niveau suivant, avec la 5ème l'an prochain.
       Nous avons aussi visité le premier cycle. Une des salles de classes a été fermée 10 jours avant notre venue (le tableau noir qui n'a pas été effacé l'atteste), le mur est lézardé et risque de s'effondrer. Les deux salles dans le même bâtiment continuent à être utilisées, mais toute cette construction mériterait d'être réhabilitée. Dans une des salles où deux classes étaient regroupées il y avait environ 90 enfants. Ils sont assis sur des tables-bancs; alors que chacune est prévue pour deux places ils s'y entassent à 5.

       Le mardi 28 octobre nous avons visité le périmètre irrigué avec l'Imam Ibrahima Soumaré qui en est l'initiateur (il est aussi à l'origine du jumelage entre Limours - les Molières et Fégui). Un projet de clôture de ce périmètre (1,5 km de long) est à l'étude, le Comité de Jumelage suit la question.
       Ensuite nous avons fait un petit tour à Kidira au Sénégal. Cette petite ville dispose de l'électricité, et le développement est incomparablement plus avancé: il y a des magasins, un marché, même un cyber café où j'ai pu consulter rapidement mon courrier électronique.
       L'après-midi nous avons visité un moulin à grains qui fonctionne à l'aide d'un moteur diesel. Il a été donné par un parti politique et la personne qui le gère propose qu'il soit associé à un générateur quand le moulin ne fonctionne pas, de façon à pouvoir assurer l'électrification d'autres appareils.

       Le mercredi 29 octobre nous avons pris la route de retour de Fégui à Bamako en passant par Kayes. À Kayes nous avons rencontré le Dr Sory Ibrahima Yoroté, médecin chef du centre de santé de référence du cercle de Kayes dont dépend le CSCOM de Fégui. Les relations entre les différents responsables du CSCOM, le médecin chef du cercle, le médecin qui dirige le centre et la municipalité, sont excellentes et cela contribue à un fonctionnement serein de ce CSCOM. Nous avons aussi visité à Kayes l'entreprise Amadou Drame -P.T.P. Menuiserie Mixte qui fabrique des tables-bancs: le prix unitaire est de 22 500 ou 45 000 F CFA selon la qualité. Là aussi le comité de jumelage suit la question.

       Nous avons passé les deux dernières nuits de notre séjour au Mali dans la Maison d'Hôte G.I.E. Benso-Mazaugue à Magnanbougou.

       Le jeudi matin, 30 octobre, pendant que Michel donnait un exposé introduction aux codes correcteurs d'erreurs au Département de Mathématiques et Informatique de la Faculté des Sciences et Techniques (FAST) à l'Université de Bamako, Jacques faisait des achats pour Aurélie Desrousseaux, la femme de Pierre-Antoine, qui monte un commerce par internet de bijoux.
       L'après-midi nous sommes allés à Dialakorodji. Cette commune rurale dépend du cercle de Kati dans la région de Koulikoro. Un grand nombre de ses ressortissants travaillent à Bamako. Il n'y a pas d'émigrés originaires de cette commune, et les ressources sont de ce fait très limitées. Le Plan de Développement Social Économique et Culturel PDSEC 2005-2009 prévoit une extension du CSCOM. La construction d'un logement pour le médecin est en cours de réalisation.
       Au CSCOM de Dialakorodji nous avons été accueillis par Idrissa Traoré, adjoint en charge de la santé. Il se trouve que c'est lui qui avait fait un devis pour la clôture du centre de santé d'Heremakono (projet qui est en sommeil maintenant, en attendant une amélioration de la situation de ce dispensaire). Nous avons longuement discuté avec lui, une infirmière Awa ainsi que notre chauffeur Adama pour cerner les besoins principaux de ce centre. Il y a en moyenne 140 naissances par mois. Lors de notre passage trois naissances ont eu lieu, dont celle de deux jumelles qui ont été prénommées Anne et Nicole.
       Nous sommes ensuite allés à la mairie où nous avons rencontré le Maire, M. Oumar Guido, qui était professeur de philosophie, psychologie et didactique. Il a une grande expérience du terrain et fait preuve d'un dynamisme remarquable, associé à une modestie étonnante. Il aimerait jumeler Dialakorodji avec une autre ville, il n'y est pas parvenu jusqu'à présent faute de contacts internationaux - nous aimerions que notre passage lui donne une ouverture pour réaliser ce désir. La route pour aller de Bamako à Dialakorodji est dans un état lamentable, mais il est prévu d'y faire passer le goudron, ce qui changerait beaucoup de choses. Par exemple il est probable que l'électrification serait réalisée, auquel cas le CSCOM en bénéficierait et pourrait acquérir du matériel par exemple pour faire des échographies.

       Le vendredi 31 nous sommes retournés à Heremakono, nous sommes d'abord passés voir le dispensaire et constater que la fréquentation est toujours très basse: entre 0 et 3 visites par jour, 3 naissances par mois.
       Nous avons rencontré trois personnes de la Fondation d'Auteuil venant étudier un projet de création d'école à Heremakono. Nous leur avons fait part de notre expérience et de l'importance de respecter les formes administratives dans ce genre d'entreprise.
       Puis, avec le fils de Baba Dramé nous sommes allés à Dialakoroba visiter le CSCOM dont dépend le dispensaire d'Heremakono. Ce centre est très bien entretenu, il est très actif: en moyenne 40 accouchements par mois. Quand nous y étions il y avait beaucoup de patients attendant pour recevoir des soins (alors que nous n'avons pas vu de patients à Heremakono). Ensuite nous nous sommes rendus à Ouelessebougou où nous avons rencontré le Dr Mahamadou Traore, médecin chef du centre de santé de référence dont dépendent le dispensaire d'Heremakono et le CSCOM de Dialakoroba. Baba Dramé nous y a rejoints. Nous nous sommes mis d'accord sur le fait que la première chose à faire est de réunir les différents partenaires: les représentants d'Heremakono, les élus du conseil municipal de Dialakoroba, les autorités médicales du centre de référence, afin de trouver un accord permettant de préciser le statut juridique du dispensaire. Karim Samake accepte de nous représenter dans ce processus.
       Au retour, nous sommes passés par la mairie de Dialakoroba - il était plus de midi, un vendredi; nous n'avons pas pu voir le maire ni un de ses adjoints, mais nous avons demandé que le PDSEC nous soit communiqué.
       L'après-midi nous avons rencontré le Professeur Marouf Keita qui était chef du service de pédiatrie de l'hôpital Gabriel Touré, où Hélène a fait son stage en 2003.
       Nous avons repris l'avion le vendredi soir pour être de retour le 1er novembre.

       Le financement de ce voyage, transport et séjour, a été pris en charge entièrement par nous - précisons cependant que les dépenses justifiées par des factures seront considérées comme des dons à une association de loi 1901, donnant lieu à une déduction fiscale.

       Merci
       - aux amis Limouriens du comité de jumelage qui ont préparé notre arrivée en prévenant leurs correspondants à Fégui - merci spécialement à Jean-Claude Roubinet de nous avoir suggéré d'y aller
       - à tous ceux qui nous ont accueilli chaleureusement, ils sont tellement nombreux que nous ne pourrions pas tous les citer sans en oublier. À Heremakono, à Fégui, à Dialakorodji et à Bamako nous avons été reçus de façon inoubliable. L'hospitalité malienne est merveilleuse, c'est une des nombreuses richesses de cette culture si différente de la nôtre
       - à Adama et Amadou, nos chauffeurs (à Bamako et pour le voyage à Fégui en 4x4), nous les recommandons vivement
       - aux personnes qui ont fait don de médicaments et d'instruments médicaux que nous avons remis à Fégui et à Dialakorodji - ce genre de contribution est très appréciée, les centres de santé sont très démunis. Merci par avance pour vos dons en nature que nous ferons parvenir via aviation sans frontières (ASF) dont Jacques est membre, ou par tout autre moyen, notamment les visites fréquentes effectuées dans le cadre du jumelage.
       - à Karim Samake qui m'a proposé de suivre l'évolution du dispensaire d'Heremakono.
       - et à Hélène Seuxet: notre voyage a montré combien il est important que tu poursuives le travail admirable que tu as commencé au Mali.

       Photos prises lors de cette visite au Mali fin octobre 2008.